Gine de Dragon Ball, petit cordon bleu au tranchoir selon Konbini

Je suis tombée, en ce beau 8 avril 2014, sur un article du site Konbini.fr (Dragon Ball : 30 ans après, Akira Toriyama dévoile la mère de Sangoku) dévoilant aux yeux de nombreux fans de Dragon Ball, dont je fais softement partie, qui est la mère de Sangoku.

L’auteur, pour ne pas le paraphraser, nous dit :

Depuis la création de l’univers en 1984 jusqu’aujourd’hui, personne n’avait jamais vu la génitrice du jeune guerrier Saïyen. Et si l’on connaît son balafré de père, à l’âpre nom de Baddack (ci-dessous en image), la figure maternelle n’est quasiment jamais évoquée lors de l’intrigue. Les fans français ont pu découvrir la mère de Sangoku pour la première fois grâce à un tweet de @Newsmangajapon, dont l’image intégrée est reproduite ci-dessous.

Jusqu’ici, je n’ai pas grand-chose à redire, à part tout de même qu’il ne s’agit pas de « Baddack » mais de « Bardock. » Je suis plutôt excitée d’en apprendre plus sur la mère de Sangoku mais je déchante rapidement à la vue de la fameuse image, ou plutôt de la légende qu’en a fourni l’auteur. Quelle n’est pas ma surprise de lire : « Gine, la mère de Sangoku, qui prépare une sorte de dîner et serre son homme Baddack dans ses bras (Crédits image : Akira Toriyama). »

Dessin de la mère de sangoku accompagné de sa légende sexiste: « Gine, la mère de Sangoku, qui prépare une sorte de dîner et serre son homme Baddack dans ses bras »

Je regarde à nouveau l’image, puis encore une fois la légende, de nouveau l’image, la légende, l’image, la légende, etc. Non, décidément, il y a un problème. Vous ne le voyez pas ? Je pense que les plus attentif/ves d’entre vous ont déjà deviné… Oui, vous avez bien vu : mais à partir de quoi donc peut-on conclure de l’image de Gine qu’elle est en train de cuisiner un repas ? D’accord, vous ne parlez pas japonais, mais je vous rassure, moi non plus et pourtant une analyse un minimum fine de l’image suffit à elle-seule à comprendre que la légende ne décrit absolument pas correctement Gine. Cette légende n’est que le résultat des stéréotypes sexistes et des idées préconçues de l’auteur qui veut qu’une femme qui touche à des aliments est forcément en train de faire la popote, bien entendu pour son guerrier de mari, qui doit être bien fatigué d’avoir bastonné des ennemis pendant son voyage.

Observons de plus près l’image, ce que j’ai fait et refait dans un premier temps pour être bien sûre de moi. Observez la nudité de la salle (pas très cosy pour un chez-soi). Observez la rue sur laquelle donne cette pièce à ciel ouvert, pleine de badauds. Observez la femme qui choisit une tranche sur l’étal de viande. Observez la quantité industrielle d’os jeté dans le coin « poubelle ». Observez l’absence d’autres ingrédients permettant de mitonner un repas.

Non, décidément Gine ne fait pas « une sorte de dîner ». Aucun élément ni de l’image seule ne nous permet de faire une telle extrapolation. Gine semble tout simplement être bouchère.

Il est très facile de sortir l’argument habituel, mais qui pour le coup fonctionne très bien : un homme, dans cette situation, aurait-il été décrit comme préparant « une sorte de dîner ? » Absolument pas, on l’aurait immédiatement replacé dans son contexte : au travail dans une boucherie.

J’ai immédiatement fait part de mes réflexions sur la page Facebook de Kombini FR et je leur ai interpellés sur Twitter. L’auteur m’a gracieusement répondu, d’une réponse qui, au-delà de l’erreur de légende, nécessite une analyse à elle seule, tellement elle est représentative du sexisme dans lequel la geekosphère baigne.

Bonjour Solène,

C’est moi-même qui ai rédigé l’article. Je peux vous assurer qu’en aucun cas je n’ai sous-entendu une quelconque remarque sexiste liée à la condition de femme de Gine.

Après, comprenez que je n’y suis pour rien : elle prépare effectivement la nourriture. Aussi, les femmes sont souvent reléguées à ce rôle dans Dragon Ball, une série assez peu progressiste en matière de couple. Souvenez-vous : Chichi, la femme de Sangoku, est une caricature de femme au foyer, réduite au ménage et à la cuisine. Encore une fois, je n’y suis pour rien.

Ce n’est pas moi qui suis sexiste. C’est peut-être plutôt la situation dans laquelle Toriyama illustre certains de ses personnages qui vus gêne.

Bien à vous,

Theo

J’ai trouvé cette réponse de très mauvaise foi. Non seulement il ne prend absolument pas en compte l’environnement dans lequel Gine est représenté et que j’ai décrit mais il prend pour prétexte que si une autre femme est une caricature de la bonne ménagère, alors les autres femmes, donc Gine, doivent elles-aussi être pareilles. Or Chichi est plutôt une exception parmi les personnages féminins de Dragon Ball. Si le manga n’est effectivement pas du tout dénué de sexisme (personnages féminins minoritaires, machisme des personnages masculins, etc.), les femmes y ont souvent des caractères travaillés et intéressants, qui ne les réduisent pas au rôle de ménagère. Bulma est une inventrice hors-pair et a un sacré caractère. Lunch a une double personnalité, tantôt douce et naïve dans sa version cheveux foncés, tantôt vulgaire et violente dans sa version cheveux clairs. C-18 est une guerrière qui ne ménage pas son compagnon Krilin. Il y en a d’autres mais, à part Chichi, peu de personnages féminins peuvent se résumer à faire la popote à la maison.

Voici le raisonnement à l’œuvre : parce que les femmes sont généralement comme ci ou comme ça, je peux me permettre de ne pas prendre en compte les particularités de chaque individue dans une situation donnée et la déposséder de ses véritables attributs… Pire, l’auteur prétend que sa description sexiste est le fait d’Akira Toriyama sur lequel il se dédouane totalement alors qu’il l’a totalement inventée, aveuglé par une mentalité sexiste, qui sera ensuite largement véhiculée. L’article a en effet été partagé pas moins de 19 000 fois.

J’ai répondu sur Facebook avec davantage d’arguments encore. Les fans Français n’ont apparemment pas tardé à récupérer des scans du chapitre et à en faire une traduction en français. Il n’y est nulle part question d’un quelconque dîner ou de quelqu’autre élément permettant de conclure péremptoirement que Gine en cuisine un.

De plus, la biographie de Gine a été éditée le 9 avril 2014 sur Dragon Ball Wiki. Ironie de la chose, la même image de Gine est ainsi légendée : « Gine working at the meat distribution center ». Gine est soldate et employée de boucherie. Exit le dîner, je pense qu’on ne peut pas être plus clair.

Légende sur dragonball.wikia.com : « Gine working at the meat distribution center »

Pour conclure, « Gine, la mère de Sangoku, qui prépare une sorte de dîner et serre son homme Baddack dans ses bras » est une légende qui à elle-seule résume parfaitement le stéréotype sexiste pesant sur la fêêêêêêêêmme parfaite dans la société patriarcale. La Sainte Trinité : mère, ménagère et épouse de..… C’est aussi simple que ça, et c’est plus que lourd.

Édité par Alda

Les pilotes d’Infinite Stratos

Les Infinite Stratos (IS) sont des exo-armures (ou mecha) de l’animé éponyme qui ont la caractéristique de ne pouvoir être pilotées que par des personnages féminins (ou presque).

Outre les tenues pour le moins aguichantes des différentes héroïnes (pour ne pas dire autre chose), on peut voir un schéma assez particulier sur le screenshot en figuré.

Infinite Stratos

Alors que la totalité des pilotes de IS soient des femmes (sauf une unique exception : le héro de l’anime), le schéma au tableau représente un homme.

Ça m’a personnellement laissé dubitatif, mais c’est surtout un bon moyen de comprendre le concept de cet animé.

Car l’histoire avance en s’articulant autour du personnage masculin principal au niveau relationnel, mais aussi scénaristique, et on a droit à notre lot de fan-service avec par exemple, un exemple de différence de tenue requise pour piloter un IS :

Une armure de meuf

Une armure de meuf

Une autre armure de meuf

Une autre armure de meuf

Une armure de mec

Une armure de mec